Ces photographies sont en relation avec le contenu du livre La Jouissance ordinaire d'Alain Simon
Quand j’écris et que je photographie, il s’agit en fait de parler de la même chose mais dans une forme induisant un regard et une posture différents chez les spectateurs/lecteurs. Écrire, c’est construire un paysage qui apparaît petit à petit au fil des mots. Le paysage photographique, lui, s’offre d’emblée au regard et le spectateur, à partir de cette impression générale, va fouiller l’image par cercles concentriques pour accéder aux plus petits détails. Dans l’écriture c’est l’accumulation des détails qui donne la saveur générale alors que dans la photographie la saveur générale précède l’investigation approfondie. D’ailleurs on voit les visiteurs des expositions s’approcher tout près de l’image pour mieux l’investir ! Mais dans ces deux formes d’expression l’art est toujours l’art du détail.
Le photographe, à la différence de l’auteur qui est totalement responsable des mots qui constituent son texte, découvre dans l’image qu’il a prise le fourmillement de détails qui la constitue ! Même si le regard du photographe crée un geste qui unifie le cliché, celui-ci reste toujours en partie une photocopie du réel qui échappe à l’artiste.
Ces quelques photos exposées sont toutes en noir et blanc. Pour moi une des forces principales de cette monochromie est de permettre une continuité territoriale entre les êtres vivants et les choses qui les entourent au point d’atteindre cette unité anthropomorphique ou minérale selon qu’on les regarde. « Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? »
Extrait de La Jouissance ordinaire : ...La nostalgie, souvent considérée comme un sentiment rétrograde, est en fait ce processus fécond qui permet de revisiter le passé en le contemplant à son aise. Au moment où les événements évoqués avec nostalgie se produisirent, leur asservissement au temps nous empêchait d'en profiter pleinement. Le souvenir est comme un os dont le chien s'empare et qu'il emporte dans un coin à l'écart pour le ronger tranquillement. Seule la nostalgie, c'est à dire la remémoration, peut donner cette sensation d'heureux ruminement. Le photographe qui prend un cliché d'un centième de seconde sait qu'avec l'image de ce micro instant il fixe sur la pellicule un événement dont il ne parvient pas à profiter sur le moment, parce que le temps se déplace sans cesse, filant entre les doigts comme du sable. Une fois rentré chez lui, il regardera l'instantané qu'il a pris. Confortablement assis devant l'écran de son ordinateur, il va reconstituer ce qu'il a photographié et s'en délecter. C'est pour cette raison qu'en photo on parle de capture. Et la nostalgie est la compensation positive au fait de ne pas avoir pu ou su vivre cet instant au moment où il se produisait. En entendant la même musique qu'il écoutait hier, il mesurait aujourd'hui que les moments auxquels elle avait été associée avaient été des moments heureux. Comme le cliché photographique, le morceau de musique les a enregistrés en s'associant à eux. Et quand on ne peut pas ou veut pas profiter du présent, on peut toujours l'épargner en en faisant des clichés ou des films. En les regardant, on "rattrape le temps perdu". Au bout du compte, le photographe est un sage, conscient de sa difficulté à vivre, il se bat pour y remédier... Alain Simon
Quand j’écris et que je photographie, il s’agit en fait de parler de la même chose mais dans une forme induisant un regard et une posture différents chez les spectateurs/lecteurs. Écrire, c’est construire un paysage qui apparaît petit à petit au fil des mots. Le paysage photographique, lui, s’offre d’emblée au regard et le spectateur, à partir de cette impression générale, va fouiller l’image par cercles concentriques pour accéder aux plus petits détails. Dans l’écriture c’est l’accumulation des détails qui donne la saveur générale alors que dans la photographie la saveur générale précède l’investigation approfondie. D’ailleurs on voit les visiteurs des expositions s’approcher tout près de l’image pour mieux l’investir ! Mais dans ces deux formes d’expression l’art est toujours l’art du détail.
Le photographe, à la différence de l’auteur qui est totalement responsable des mots qui constituent son texte, découvre dans l’image qu’il a prise le fourmillement de détails qui la constitue ! Même si le regard du photographe crée un geste qui unifie le cliché, celui-ci reste toujours en partie une photocopie du réel qui échappe à l’artiste.
Ces quelques photos exposées sont toutes en noir et blanc. Pour moi une des forces principales de cette monochromie est de permettre une continuité territoriale entre les êtres vivants et les choses qui les entourent au point d’atteindre cette unité anthropomorphique ou minérale selon qu’on les regarde. « Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? »
Extrait de La Jouissance ordinaire : ...La nostalgie, souvent considérée comme un sentiment rétrograde, est en fait ce processus fécond qui permet de revisiter le passé en le contemplant à son aise. Au moment où les événements évoqués avec nostalgie se produisirent, leur asservissement au temps nous empêchait d'en profiter pleinement. Le souvenir est comme un os dont le chien s'empare et qu'il emporte dans un coin à l'écart pour le ronger tranquillement. Seule la nostalgie, c'est à dire la remémoration, peut donner cette sensation d'heureux ruminement. Le photographe qui prend un cliché d'un centième de seconde sait qu'avec l'image de ce micro instant il fixe sur la pellicule un événement dont il ne parvient pas à profiter sur le moment, parce que le temps se déplace sans cesse, filant entre les doigts comme du sable. Une fois rentré chez lui, il regardera l'instantané qu'il a pris. Confortablement assis devant l'écran de son ordinateur, il va reconstituer ce qu'il a photographié et s'en délecter. C'est pour cette raison qu'en photo on parle de capture. Et la nostalgie est la compensation positive au fait de ne pas avoir pu ou su vivre cet instant au moment où il se produisait. En entendant la même musique qu'il écoutait hier, il mesurait aujourd'hui que les moments auxquels elle avait été associée avaient été des moments heureux. Comme le cliché photographique, le morceau de musique les a enregistrés en s'associant à eux. Et quand on ne peut pas ou veut pas profiter du présent, on peut toujours l'épargner en en faisant des clichés ou des films. En les regardant, on "rattrape le temps perdu". Au bout du compte, le photographe est un sage, conscient de sa difficulté à vivre, il se bat pour y remédier... Alain Simon
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